ERA - Ameno


Hiver 1997,

Avec mon père en voiture. Ce week-end, il est venu me chercher dès le vendredi soir ! Parfois, je n’ai pas cours le samedi. Direction, chez les grands-parents ! J’adore aller là-bas, et le trajet entre Le Havre et Dieppe y est pour beaucoup. On écoute les CD et cassettes préférés de mon père dans sa nouvelle Ford Mondeo. Des live de Jean-Jacques Goldman, un petit best-of de Pink Floyd, voire des singles de Boney M, de Queen ou de U2, le choix est vaste. À l’époque, la dernière portion de l’A29 n’est pas encore terminée et à partir d'Yvetot, on passe par tout un tas de petites routes de campagne en traversant de mignons petits villages. Enfin mignons… en pleine nuit, la Normandie profonde n’a pas grand chose d’accueillant, surtout lorsque le brouillard s’en mêle. J’ai vite fait d’être effrayé par des formes monstrueuses dès que je regarde un peu trop longtemps par la fenêtre.


Dans les environs de Val-de-Saâne, mon papa insère un nouveau disque dans l’autoradio, en me promettant que ça va être génial. C’est un nouveau truc super original, un style de musique que personne n’a jamais entendu auparavant ! Je lui fais confiance, bien que dubitatif quand l’introduction faite de pseudo chants grégoriens emplit l’habitacle. C’est quasiment a capella, depuis quand mon père écoute ce genre de trucs ? Puis viennent les riffs de guitare électrique. Première surprise. Des religieux rockeurs ? En effet, c’est… étonnant. Et archi cool ? Trop tôt pour le dire. Par contre, quand la batterie s’invite, juste après que les chanteurs scandent un puissant “Ameno”... Ouah ! Cette avalanche de frissons dans le dos ! C’est dingue comment c’est trop bien ! Le mélange improbable du chœur d’église et du hard-rock donne le cocktail d’émotions le plus extatique qui soit ! En plus, on passe devant la chapelle du village au même moment !


Je me sens pousser des ailes d’ange enflammées. L’extérieur sombre et angoissant du bocage normand ne m’effraie plus. Je suis prêt à affronter les démons qui rôdent dehors à mains nues s’il le faut ! Tant qu’Ameno résonne dans mes oreilles pour accompagner ma quête de purification du mal. N’empêche, on n’a pas été les seuls à tomber sous le charme. Le single et l’album se sont super bien vendus. Même au collège on en a parlé ! Au début avec des étoiles dans les yeux, puis assez vite en ricanant de dédain. L’enthousiasme autour de cette chanson fut aussi intense qu’éphémère. Avec le recul, je crois que c’est plutôt une bonne chose.



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