The Prodigy - Smack My Bitch Up




Août 98,

Je suis en vacances avec mon père. On est partis en famille, avec sa compagne et mon petit frère âgé de neuf mois. Cette année, ils ont loué un logement dans un camp de vacances, sans doute pour me faire plaisir. À force de dire qu’on fait ça en Ardèche depuis trois ans avec maman, j’ai peut-être déclenché un truc. Franchement, l’ambiance est cool, je me fais quelques bons potes.

Le soir, je ne rentre pas très tard, je n’ai pas encore l’âge de faire l’idiot jusqu’à pas d’heure. Pourtant, j’en meurs d’envie ; je commence tout juste à entrevoir les immenses possibilités offertes par la nuit. Ma grande sœur m’a déjà raconté les soirées durant lesquelles elle danse sans arrêt, jusqu’à ce que le jour se lève. Je sais que je dois encore attendre un peu pour vivre la même chose, mais qu’est-ce que c’est long !

Du coup je patiente dans ma chambre, à lire des magazines de jeux vidéo ou un hors série sur les dragons, de je ne sais plus quelle marque. Cependant, c’est surtout grâce à mes CD que je tiens le coup. Le second album de Garbage, notamment, me file une claque mémorable, mais ce n’est rien comparé au disque que ma sœur m’a convaincu d’acheter sans hésitation. “C’est ce qui marche le mieux en soirée, en ce moment ! C’est terrible !” The Fat of the Land, troisième album de The Prodigy.

La chanson d’ouverture est un pur chef d’œuvre de big beat, tout aussi sombre que frénétique. Un cri de guerre scandé par un danseur fou, j’adore. Une ligne de basse synthétique qui répand le mal sur le monde, fantastique ! Une boîte à rythmes possédée par un démon, excellent ! La voix d’une succube capable d’envoûter la planète entière, je kiffe de ouf ! Les lamentations d’une guitare dont les cordes ont été tissées durant l’apocalypse… MY-THIQUE !

Allongé dans mon lit, Smack My Bitch Up tente de prendre le contrôle de mon corps, et je me fais violence pour ne pas réveiller toute famille en détruisant tout le mobilier. Ce morceau procure une énergie de malade, mais c’est une énergie crasseuse et malfaisante. Le seul moyen de ne pas perdre la raison : se cramer les pieds sur le dance-floor. Et le plus génial dans tout ça ? Le disque tout entier suinte de ce même son, sorti des limbes infernales d’une dimension futuriste et dévastée !

Heureusement pour ma santé mentale, une espèce de soirée / boum / teuf a lieu un peu plus tard dans la semaine, dans les locaux du village vacances. L’animateur est super cool, il me laisse passer cinq chansons de l’album. Mes courbatures ont duré trois jours.




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