Oddoworld : l'Exode d'Abe



Date de sortie : 1998 (Playstation)


Type de jeu

Fabuleux voyage chaotique au pays du capitalisme sauvage et de la corruption généralisée. Heureusement, tout ça est bien planqué derrière des décors somptueux.





Premier contact

Chez papa, on est passés de la Master System à la Playstation au début de l’année 1997, je crois. Sacré bond technologique ! Après avoir testé une poignée de jeux pas toujours géniaux, et flippé comme jamais devant Resident Evil, le charme de l'Odyssée d’Abe nous a définitivement fait tomber amoureux de la console. Quand la suite, l’Exode d’Abe, a été annoncée l’année suivante, je n’ai même pas eu besoin de le réclamer en cadeau d’anniversaire ; mon père l’avait déjà acheté. Je suis même à peu près sûr qu’il ne m’a pas attendu pour y jouer ! Sacrilège ! Quel genre de parent ose agir de la sorte envers ses enfants ?





Retour sur expérience

À l’heure où le jeu de plateforme perdait du terrain sur à peu près toutes les machines, Abe lui a redonné ses lettres de noblesse le temps de deux titres captivants, au gameplay renouvelé et au level design assez dingue. Le nombre d’options qui s’offrent au joueur est immense, d’autant plus dans le second opus : dialogue avec d’autres personnages, possession du corps des ennemis, camouflage, lancer de projectiles… le tout servant à évoluer dans des niveaux tortueux, parfois sur plusieurs plans dans le même écran. Autre grosse nouveauté, le système de vies et de continues, héritage un peu obsolète des bornes d’arcade, a enfin été abandonné. En plus, le but du jeu est de sauver les compagnons d’Abe, les Mudokons, des esclaves exploités jusqu’à l’os (littéralement) par d’horribles industriels véreux. De quoi faire briller les yeux d’un apprenti islamo-écolo-bobo-gauchiste comme moi.





Flashback spécial ambiance

Si le protagoniste un peu niais reste très attachant, le titre doit une grande partie de son succès à sa patte graphique. Ainsi, on traverse divers paysages allant de la gare délabrée à la jungle impénétrable, en passant par des caveaux mystiques et une brasserie morbide (qui broie les os des gentils Mudokons pour en faire de la bière, oui). Tout est sombre et désolé, chaque région du monde oppresse le joueur à sa manière, via des paysages statiques absolument magnifiques, même à travers nos yeux impitoyables habitués à l’ultra HD et tout le bazar. Les artistes ont pioché dans le meilleur du steampunk, du post-apocalyptique, mais aussi dans les créations de notre Mère Nature bien aimée, pour donner vie à un univers inoubliable. Les énormes pipelines rouillés côtoient les racines d’arbres millénaires, les immenses chaînes de production laissent place à des montagnes sacrées. Et pourtant, on se marre. Ah bah oui, c’est bourré d’humour aussi. Il ne faut pas s’attendre à une subtilité de dingue, mais ça fait souvent le job. En tout cas, ça faisait le job dans les années 90 (du coup, je ne suis plus du tout certain de rigoler aujourd’hui).





Réécoute de la bande-son

Non seulement la musique apporte une touche de perfection à l’ambiance, mais en plus, elle est intelligente ! Enfin presque. Selon les actions menées par le joueur dans un niveau donné (comme fuir des pseudo chiens enragés ou se faire découper par un hachoir mécanique géant), une section plus ou moins rythmée et angoissante accompagne la scène. Ça envoie du lourd quand d’affreux soldats nous tirent dessus et ça se change en berceuse lorsqu’on s’arrête pour souffler derrière un gros caillou. Parfois, on flirte avec les limites de la musique savante expérimentale, ce qui peut toujours vous faire passer pour très cultivé dans les bons milieux.




Moment Nostalgie

Si j’ai adoré explorer le jeu pour la première fois avec mon papa, j’ai encore plus apprécié le faire découvrir à mes petits frères dix ans plus tard. La console avait pris la poussière mais l’Exode d’Abe, pas du tout ! Voir les deux gamins pousser des “Ouaaah” admiratifs à chaque minute m’a fait avaler une cinquantaine de Madeleines de Proust numériques d’un coup. Je me suis revu à peu près au même âge, fasciné par mes propres aventures vidéoludiques, seul ou avec ma grande sœur. J’ai beau essayer de ressentir cette magie nostalgique en écrivant ces textes, sur fond de playlist gaming vintage, rien à faire ! La puissance n’est pas la même. Je n’ai plus qu’à espérer qu’on découvre comment remonter le temps dans les quarante prochaines années.

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