Adibou 2




Date de sortie : 1996 (PC)


Type de jeu

Fabrique de petits génies sur-cultivés… selon les standards d'un monde à peu près dix fois plus stupide que dans le film Idiocracy.




Premier contact

En 1996, je n’avais clairement plus l’âge de passer mon temps libre devant un jeu éducatif comme Adibou 2. Ma petite sœur, par contre, du haut de ses cinq ans, se trouvait en plein dans le cœur de cible. Un jour, alors que je comptais m’installer sur l’ordi pour me faire une petite partie de Command and Conquer ou de Worms, j’ai eu l’immense plaisir de voir ma cadette aux commandes du clavier et de la souris. Mon beau-père se tenait debout à ses côtés, dardant ses yeux plein de mépris sur ma petite personne pour me mettre au défi d’essayer de déloger sa fille. Je n’ai pas essayé, bien entendu, en tout cas pas de manière directe. Au lieu de ça, je me suis assis à ses côtés, en lui faisant croire que j’allais jouer avec elle, alors que je tenterais subtilement de la diriger vers d’autres activités. Cinq minutes plus tard, on passait ce qui allait faire partie de nos moments de complicité les plus forts. La voir enthousiasmée autant que moi par un jeu vidéo m’a aussitôt ôté toute envie de l’asticoter. Dès lors, chaque fois qu’elle se lançait dans une partie d’Adibou, je me suis employé à faire en sorte que son expérience soit la plus cool possible.





Retour sur expérience

Dans Adibou 2, impossible de faire progresser notre sorcière au niveau 99, pas moyen de sauver la galaxie en pilotant un vaisseau spatial ultra futuriste. On y vient pour apprendre des trucs de la vraie vie, et en s'amusant s’il vous plaît ! En théorie du moins. D’ailleurs, des trucs à potasser, il y en a un paquet ! Enfin, un peu moins si on met de côté toutes les bêtises qui parsèment le titre (exemple : donner un gâteau au chocolat entier à bouffer à un chien. Ne faites JAMAIS ça ! C’est très dangereux pour le chien, oh !). La richesse du contenu a de quoi impressionner, avec des mini-jeux partout (un casse-briques, des puzzles, un logiciel de dessin du style Paint, entre autres). On peut s’entraîner à lire, à compter, à chanter, mais aussi à s’occuper de légumes ou d’oiseaux virtuels (de manière ultra simplifiée, hein). Tout n’est pas super bien foutu mais a le mérite d’exister (dans les années 90, cette maxime s’applique à peu près à tous les logiciels existants). Personnellement, je préférais m’attarder dans la section du jardin, où l’on pouvait planter des fleurs et donner une ruche à des abeilles, et où les possibilités de personnalisation étaient les plus abouties. Pour être honnête trois minutes, même si je trouvais débiles la plupart des mécaniques de jeu, vu que j’avais onze ans, j’aurais adoré découvrir le jeu au même âge que ma sœur. Ça m’aurait mis une claque des plus mémorables, à n’en pas douter.





Flashback spécial ambiance

Attention, on s’adresse aux jeunes enfants, ici ! Du coup, Adibou 2 dégouline de mièvrerie et… de phrases infantilisantes, quoi. On connait tous un oncle ou une amie des parents pas très à l’aise avec les gosses, mais voulant bien faire, s’appuie sur ses genoux et se met à parler avec une voix exaspérante. Là c’est pareil, mais en plus, la voix te suit partout et te répète les mêmes choses dix fois de suite, toujours de la même manière. Comme si tonton bizarre avait un sérieux problème mental. Les gamins ont le don de laisser ce genre de trucs leur passer au-dessus de la tête ; je crois que leur cerveau se crée surtout un mécanisme de survie pour ne pas se changer en tueur en série dès l’arrivée de la puberté. Reste qu'un charme tout particulier se dégage de tout ça, comme c'était le cas pour de nombreux point and click de l'époque. Je n'arrive pas à mettre le doigt sur ce qui rend ces jeux si spéciaux. Les dessins se voulant mignons mais qui se révèlent ultra flippants ? Les interactions entre les personnages super mal calibrées ? Les animations bancales et répétitives ? On se demande parfois si les développeurs ne voulaient pas traumatiser les gosses au lieu de les éduquer et les divertir. Car dans Adibou 2, la frontière entre mignonnerie et horreur pure est parfois très floue.



Réécoute de la bande-son

Adibou 2 regorge de chansons et comptines, la plupart accompagnées de clips animés. Super génial, nan ? Nan, pas tellement, car ça se complique assez vite. Le souci vient surtout de la propention du petit personnage jaune à casquette rouge à chanter (je parle d’Adibou, hein, pour ceux qui n’avaient pas encore compris), qui horripile toute personne âgée de six printemps et plus. Sa voix aiguë, hachée et somnolente à la fois, sonne comme une sirène de police noyée dans un flacon d'éther, mais refusant de rendre l'âme. Surtout que les mélodies et arrangements ne servent qu'à la mettre encore plus en valeur. Je crois que même ma petite sœur ne s'est pas attardée sur la section sonore du jeu. Peut-être l’ai-je un peu influencée, en faisant semblant de vomir dès que retentissait cette tessiture si particulière. À moins que ses parents ne lui aient greffé un casque sur les oreilles pour préserver les autres occupants de l’appartement.



Moment Nostalgie

Une session de jeu se déroulait en général selon une routine bien précise : je laissais ma sœur s'amuser dix minutes et je la convainquais ensuite de lancer mon programme préféré : "le fabuleux jeu de création", tel qu'il est cité par une voix-off faussement rassurante. À nous de placer le mobilier et personnages dans un décor, puis d'appuyer sur lecture pour voir ce que ça donne ! Les protagonistes interagissent alors, soit en se frappant, soit en se faisant marrer, subtil. Mais parfois, lorsqu’ils passent près d'un objet, ce dernier s'anime et provoque de nouvelles réactions. Je me souviens que des couronnes serties de gemmes se changeaient en mâchoire grondante, et terrifiaient ma sœur à chaque fois. Forcément, j'en planquais toujours une quelque part, en guettant le moment où ma cadette hurlerait que j'ai été méchant avec elle. Et bam ! Moment de camaraderie terminé, beau-papa qui débarque et qui m’interdit de toucher le PC pendant une semaine… et me voilà obligé d’aller jouer dehors au soleil avec de vrais enfants pas virtuels, merde alors !

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